Executed in 1965, Instance was created at a defining moment in Jean Dubuffet's career. This pivotal period was the Hourloupe cycle, which had begun three years earlier and continued until 1974. One of the most important of his career, this series begins with simple telephone conversations, during which Dubuffet mechanically sketches shapes with blue and red pens, somewhere between writing and drawing. The result was a series of intertwined, striated shapes, which Dubuffet immediately perceived as a new plastic language. The uncontrolled movement of his hand encouraged the expression of his unconscious, which he considered far more fertile for art than knowledge. In his book Asphyxiante culture, Dubuffet explains that true art emerges not from academism, tradition or knowledge, but from chaos, driven by “instinct, passion, mood, violence and madness”. The period in which this work was produced coincided with the revival of his personal Art Brut collection, which includes numerous works by children, the mentally retarded and psychiatrically ill, deconditioned and purged of all artistic conventionalism.

In Instance, the anthropomorphic silhouettes that populate the work's surface are reduced to essential shapes and shades of black, blue and red. None of these colors, however, is reduced to its primary expression: on the contrary, each is declined in a delicate variation of tones, especially the blues, which change from electric hues to cyan tones. Similarly, whites and blacks show nuances: the former are more or less covered with creamy thicknesses, while the latter are punctuated with red. Georges Limbour emphasizes the chromatic qualities of this series: “The refinement of the colors is unequalled, even if only blue and red are used” (G. Limbour, “Jean Dubuffet : L'Hourloupe ou de l'envoûtement”, XXe siècle, No. 24, Paris, 1964).
This representation of beings according to a single formal system calls into question the conditioning of our perception and proposes a new grid for reading the world. The absence of depth, hierarchy of forms and reference to time and space places this work in the continuity of the Paris Circus cycle (1961-1962): the lost beings of the Parisian streets have ended up merging with the urban magma, to the point of becoming one with it: foregrounds and backgrounds are erased, giving way to a space populated by a profusion of forms that interpenetrate, appear and disappear:
“A latent world, in which figures are immediately born and discarded in favor of other possible configurations, leads inexorably to the questioning of certainties of vision and thought, to widespread doubt”
The irrational and arbitrary dimension, but also the fantasy of this new language, is reflected in the term Hourloupe, which titles the series. Rhyming with the word “entourloupe”, evoking the verb “hurler” and “hululer”, but also Charles Perrault's novel Riquet à la Houppe and Maupassant's Le Horla, this term draws on a fantastic and grotesque universe, inspired by Art Brut and the unconscious.
“The word Hourloupe is a name invented according to its consonance. In French, it evokes both some object or character of fairy-tale and grotesque status, and also something tragically rumbling and threatening. The two together”
Like the works in his series, Instance marks an important break in Dubuffet's career: his introduction to sculpture, and later to architecture and performance. By cutting out these drawings, he frees the objects and figures from their support, integrating relief into his practice, which until then he had rarely explored.
Exécutée en 1965, Instance est réalisée à un moment déterminant de la carrière de Jean Dubuffet. Cette période charnière est celle du cycle de l’Hourloupe, commencé trois ans auparavant, jusqu’en 1974. L’une des plus importantes de sa carrière, cette série commence avec de simples conversations téléphoniques, lors desquelles Dubuffet esquisse machinalement des formes avec des stylos bleu et rouge, entre l’écriture et le dessin. Apparaissent alors des entrelacs de formes striées et encastrées les unes dans les autres, que Dubuffet perçoit immédiatement comme un nouveau langage plastique. Le mouvement incontrôlé de sa main encourage l’expression de son inconscient, qu’il considère bien plus fertile pour l’art que la connaissance. Dans son livre Asphyxiante culture, Dubuffet explique que le véritable art n’émerge ni de l’académisme, de la tradition ou de la connaissance, mais du chaos, animé par « l’instinct, la passion, l’humeur, la violence et la folie ». La période de réalisation de cette œuvre coïncide d’ailleurs avec la reprise de sa collection personnelle d’Art Brut, qui regroupe de nombreuses œuvres d’enfants, déficients mentaux ou malades psychiatriques, déconditionnés et épurés de tout conventionnalisme artistique.
Dans Instance, les silhouettes anthropomorphes qui peuplent la surface de l’œuvre sont réduites à des formes essentielles et aux teintes noires, bleues et rouges. Aucune de ces couleurs ne se réduit toutefois à son expression primaire : chacune se décline au contraire dans une délicate variation de tonalités, en particulier les bleus, qui passent de teintes électriques à des tons cyan. De même, les blancs et noirs présentent des nuances : les premiers sont plus ou moins recouverts d’épaisseurs crémeuses, tandis que les seconds sont ponctués de rouge. Georges Limbour souligne d’ailleurs les qualités chromatiques de cette série : « Le raffinement des couleurs y est sans égal, même si ne sont employés que du bleu et du rouge » (G. Limbour, « Jean Dubuffet : L’Hourloupe ou de l’envoûtement », XXe siècle, No. 24, Paris, 1964).

Cette représentation des êtres selon un système formel unique remet en cause le conditionnement de notre perception et propose une nouvelle grille de lecture du monde. L’absence de profondeur, de hiérarchie des formes et de référence au temps et à l’espace inscrit cette œuvre dans la continuité du cycle de Paris Circus (1961-1962) : les êtres égarés des rues parisiennes ont fini par se confondre au magma urbain, au point de ne faire plus qu’un avec lui : les premiers et arrières plans sont effacés, laissant place à un espace peuplé d’une profusion de formes qui s’interpénètrent, apparaissent et disparaîssent :
« Un monde latent, où des figures naissent et se défont immédiatement au profit d’autres possibles configurations, conduit inexorablement à la remise en cause des certitudes de la vision, de la pensée, au doute généralisé »
La dimension irrationnelle et arbitraire, mais aussi la fantaisie de ce nouveau langage se retrouvent dans le terme Hourloupe qui intitule la série. Rimant avec le mot « entourloupe », évoquant le verbe « hurler » et « hululer », mais aussi le roman Riquet à la Houppe de Charles Perrault et le Horla de Maupassant, ce terme puise dans un univers fantastique et grotesque, inspiré de l’Art Brut et de l’inconscient.
"Ce mot de l'Hourloupe est un nom inventé en fonction de sa consonance. Celle-ci en français, évoque à la fois quelque objet ou personnage de statut féerique et grotesque, et aussi par ailleurs quelque chose de tragiquement grondant et menaçant. Les deux ensemble"
A l’image des œuvres de sa série, Instance marque une rupture importante dans le parcours de Dubuffet : son introduction à la sculpture, et plus tard, de l’architecture et de la performance. Découpant ces dessins, il libère les objets et figures de leur support et intègre alors le relief à sa pratique, qu’il avait jusqu’alors peu exploré.